A la suite d’un concours photo organisé par le magazine Le Monde de la Photographie j’ai eu l’occasion de participer a une expedition de 8 jours en kayak au Lac Powell a cheval entre l’utah et l’arizona. Cette expedition a été preparée dans le but de tester l’un des appareil photo de Canon, l’EOS RP. Un grand merci au Monde la photographie et à Canon pour cette experience

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Ça y est, on est en route, les kayaks et l’équipement sont chargés sur les bateaux, les falaises du Lac Powell défilent dans cette fin d’après-midi dorée. Le pilote du bateau qui nous conduit nous donne les dernières infos sur le secteur avant de nous lâcher un « you are some ballsy guys » dans la plus grande classe américaine qui nous fascine autant que nous interroge. Après 12h de vol et 6h de route, on est enfin au lac Powell.

L’environnement est aride, le lac s’assèche, cela se voit à vu d’oeil, c’est marqué dans la roche. Le paysage change peu à peu pour passer d’une large court d’eau à une véritable mer intérieure avec des reliefs qui s’étalent à perte de vu. La sensation d’immensité est forte, des buttes ocres, un ciel chargé et une mer sombre sont les seules composantes du panorama qui nous entoure.

Apprivoisant le CANON EOS RP depuis quelques jours déjà, les 8 prochaines journées en autonomie totale dans ce décor lunaire et cinématographique vont nous permettre de mettre à l’épreuve ce boîtier, petit frère du EOS R, un appareil qui à quelque peu déçu comparé à la concurrence.

Mais qu’en est il du fait simple de prendre des photos, en se reposant sur du matériel fiable qui produit des images de qualité ? La photographie est-elle une affaire de technique ou d’instinct ?

L’EOS RP semble poser la question. En effet, limité sur ce qu’il propose en photo autant qu’en vidéo : pas de stabilisation de boîtier, des nouvelles batteries nettement moins performantes que les classiques LP-E6, pas de c-log pour la vidéo, un crop a 1.6 en 4k, de quoi rebuter n’importe quel vidéaste. 

La vidéo à une bonne qualité, mais ne peut pas concurrencer ce qu’il se fait aujourd’hui, c’est un boîtier qui semble se concentrer uniquement sur la photo, la vidéo semblant être une option en plus mais aucunement un atout. En tant que cadreur/chef opérateur dans la vie de tout les jours il serait impossible pour moi de me servir de ce boitier dans un but professionnel à la différence des boitiers Sony ou Panasonic qui proposent de meilleurs débits et compressions, du log et pas de crop en 4k.

Dans le désert et en absence d’électricité, j’avais désactivé un maximum d’options pour mieux gérer mes 5 batteries, un de nos objectifs était de savoir si cette gestion d’énergie allait être un handicap ou non. J’ai ainsi désactivé le tactile, la revue des photos après déclenchement, la luminosité du viseur et de l’écran, la stabilisation des objectifs (ou alors je ne m’en servais que ponctuellement) j’allumais l’appareil uniquement pour prendre une photo une batterie pouvait alors servir jusqu’à 400 prises de vues.

J’aime particulièrement la photo de nuit et je savais que le décor du lac Powell allait être un superbe terrain de jeu pour faire des nightscapes avec une atmosphère surnaturelle, en plus on est aidé, la pleine lune se montre dés les premiers jours. 

Bien équipé avec le Canon 24mm F/1.4 L et le 16-35mm F/2.8 j’ai tous les outils pour réussir à tirer le meilleur du clair de lune. J’ai eu un vrai plaisir à faire de la photo de nuit en utilisant la lune comme source, cela a permis de révéler les reliefs sous un angle différents, le rendu de l’appareil est très bon, la clarté du viseur et de l’écran est un vrai plus, dans un souci de précision je préfère opter pour la mise au point manuel. Par contre je suis déçu par la montée en iso du boîtier. J’ai essayé de photographier un sujet lent en mouvement de nuit (notre guide Simon sur un kayak avec sa lampe frontale), j’ai ainsi poussé jusqu’à 12800 isos, pour avoir un temps de pose suffisamment rapide, et même en raw, les fichiers se sont révélés inexploitable par excès de bruit. Même si c’était une configuration très complexe, je sais que d’autres boîtiers se serait montré bien plus performant.

J’ai principalement testé l’EOS RP avec des optiques de monture EF, cela crée un petit déséquilibre sur l’avant, heureusement le matériel est plutôt léger donc cela ne gêne pas trop. Les objectifs EF n’ont rien perdu de leur réactivité avec la bague d’adaptation fourni par canon, on a l’impression d’utiliser des objectifs en monture native. Le 16-35 f/4 L et le 70-200mm f/2.8 L IS que j’ai beaucoup utilisés, sont toujours d’aussi bonnes optiques et fonctionnent à merveille avec l’EOS RP.

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Les optiques en monture RF sont bien construites et compactes, elles sont d’excellente qualité et c’est un plaisir à utiliser. Le 35mm RF m’a impressionné par son rendu (voir photos juste en dessous de ce paragraphe), c’est probablement l’objectif qui avait le moins sa place dans un voyage comme celui-ci, mais ce serait sans hésiter l’objectif que je prendrais pour shooter tout les jours. La troisième bague personnalisable sur les objectifs RF est une excellente idée, j’ai le diaphragme en plus dessus et c’était très plaisant de retrouver cette option sur du matériel si moderne.

L’exploration en kayak a été un vrai plus pour apprécier l’environnement désertique du lac. Serpenter dans les canyons annexes qui se rétrécissent procure un sentiment d’immersion rare, on ne peut qu’être impressionné par la lente glisse qui s’effectue entre les murs lisse et clair polis par l’eau qui les immergeaient il y a encore quelques années. 

L’exploration de slot canyon à pied, ressemblant fortement au très connu Antelope canyon, nous a offert des jeux de lumière et des perspectives singulière, on était les seuls dedans, nos efforts pour y accéder en kayak ont été largement récompensés. Les balades dans les canyons en pleine journée ont été une bonne occasion d’utiliser le filtre polarisant Cokin EVO, il m’a permis de renforcer les couleurs de l’eau et du ciel quand la lumière pouvait s’avérer assez dure. Le système de porte filtres CREATIVE me permettait d’utiliser simultanément un filtre polarisant + deux autres filtres (degradé ou neutre). Habitué à des filtres Tiffen ou Lee de haute qualité pour de la prise de vue cinéma ou publicitaire, j’ai trouvé que les filtres COKIN était de très haute qualité et n’atténuait en rien la colorimétrie ou la netteté de la photo final, le tout avec une bonne résistance aux chocs et aux rayures.

Les différents filtres dégradés (Nuances Extreme Gnd4S, Gnd8S,) permettent de bien atténuer le ciel pour récupérer de la matière et égaliser l’exposition entre le ciel et la terre dans les photos de paysages. Il m’ont même été utiles pour atténuer la lumière de la pleine lune lors de certaines photos de nuit. Le système modulaire est plutôt léger et rapide à utiliser. D’ordinaire, je n’utilise pas beaucoup de filtres en photo, mais là ça a été un vrai plus et ça va me servir autant en numérique qu’en argentique. J’ai essayé de me servir de la bague d’adaptation canon avec filtre polarisant intégré j’ai trouvé les résultats très peu convaincant au 16mm et j’ai préféré m’en tenir à celui de Cokin pour le reste du voyage.

À proximité de Gregory’s Butte, Bruno a repéré deux chevaux sauvages, je décide de partir seul pour un marche d’environ 30min équipé de mon boitier et du 70-200 f/2.8 afin de les photographier dans leur environnement.Les chevaux restent méfiants et après quelques dizaines de minutes passées autour d’eux je peux les avoir un peu plus de profil avec soit la profondeur du paysage ou le lac en arrière-plan. Le filtre polarisant m’a été d’une réelle aide durant cette prise de vue, il m’a permis d’accentuer les couleurs et les contrastes et casser la lumière très haute que j’avais à ce moment là. Assurément, sans cet accessoire j’aurais bien moins apprécié mes sujets.

Lors de la fin de l’expédition, je constate qu’après 7 jours dans le désert il est difficile d’échapper à la poussière qui s’est infiltré vraiment partout, toutes nos affaires sont extrêmement sèches. Il est clair d’une chose, les objectifs aussi bien que le boitier EOS RP n’ont que faire de la poussière et du sable, cela n’a eu aucun impact sur le matériel et n’a aucunement altéré le bon fonctionnement des optiques. La résistance est au rendez-vous et l’on peut compter sur ce matériel fiable en cas de conditions extrêmes.

Après avoir traité les fichiers en post-production (à noter que j’avais shooté uniquement en raw compressé tout le voyage), je suis très satisfait des images produites par le boitier et les excellentes optiques Canon, un bémol pour la montée en isos que j’ai trouvé limitée. Les raws retiennent ce qu’il faut d’information, les couleurs sont belles et les images sont bien nettes, confirmant les premières impressions sur le terrain. Bien que cet appareil a une fiche technique plutôt légère, il a rempli avec merveille son première objectif de produire de très bonnes images en gardant un système simple, instinctif, efficace et fiable. Sa légèreté et son petit gabarit en font un outil très pratique qui couvre les besoins d’une majorité de photographes.